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(Fly Away)
17 janvier 2006

Entre Terre et Eau

marecages

     Le premier homme qui s'aventura dans un marais crut sans doute être tombé en enfer : un milieu sombre, peuplé de prédateurs féroces, infesté de vapeurs délétères, assiégé par le bourdonnement insupportable des insectes, et asphyxié par une végétation tentaculaire. Sans parler des monstres imaginaires, s'ajoutant aux sables mouvants et au paludisme. Les terres humides ont alimenté les fantasmes et les cauchemars de ceux qui ont eu à les parcourir. Les premiers explorateurs du Nil, par exemple, cherchaient quelque part au coeur de l'Afrique les fabuleux monts de la Lune, d'où devaient jaillir les sources de l'eau divine. Mais leur marche s'interrompait inexorablement devant des marais infranchissables, au-delà desquels commençait le mystère. Certains marais ont pourtant été pour l'homme des terres généreuses : sources d'eau, fruits comestibles, bois, roseaux et joncs, poissons à pêcher et oiseaux à chasser... Le rapport entre l'homme et les zones humides passe par ces contradictions : le milieu le plus malsain est aussi celui dans lequel la vie, dans ses formes les plus diverses, offre ses fruits à qui sait les cueillir. Et il ne s'agit pas seulement de biens matériels, créés par les bonifications. Le milieu palustre est aussi une mine d'inspirations picturales et, en même temps, un paradis biologique pour des milliers d'espèces vivantes. Là où l'assainissement n'a pas réussi ou n'a même pas commencé, les marais ont conservé le mystère et le charme ouaté que les photographies nous restituent. Ce sont les brouillards qui passent sur les eaux stagnantes des tourbières écossaises, les chevaux lancés au galop dans les étangs de Camargue, les flamants qui se posent après un vol bref dans les roselières tropicales, le claquement des mâchoires des alligators, le sifflement du grand héron bleu qui résonne sur les marais canadiens... En ces lieux, l'union de la terre et de l'eau a engendré un fabuleux royaume, opaque comme peut l'être un diamant brut, précieux comme la perle enfermée dans sa coquille.

coeur_de_voh

© Alberto Bertolazzi

"Des chevaux blancs galopent dans un jaillissement d'eau, des hérons cendrés et des grands pélicans planent au-desssus des roseaux. Le marais est le lieu où terre et eau se rencontrent, le ventre humide de la planète, fabuleusement fourmillant de vie."

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